“Dans ce projet, j’ai investi le champ visuel des processus génératifs d’images aux limites de la mimesis des réseaux de neurones artificiels."
© Philip Poppek
Avec Yannis Flet Berliac, le développeur, nous avons entraîné un agent virtuel sur base d’images d’un visage. Pour ce faire nous avons créé une banque de données en filmant un visage dans toutes les configurations possibles. Les images ont ensuite été extraites de la vidéo.
Ces données ont été agrémentées de visages de célébrités (CelebA) et issus de Flickr. L’agent a ensuite été entrainé à comprendre par lui-même les concepts de visages, mur, etc. Pour in fine être capable de les émuler et appliquer un filtre de chair, cheveux et expressions faciales en temps réel, sur le visage de n’importe qui se tenant devant la webcam du dispositif.
Dans cette installation, le visage se retrouve ainsi au centre, comme objet à voir. Une intimité se crée alors entre ce dernier, son extrapolation en temps réel et les autres spectateurs, mais elle est comme perturbée par sa propre dématérialisation, disséquée en strates d’analyse et en lignes de codes. De ce visage ne subsiste alors plus qu’une certaine quantité d’information, nous devenons ainsi les témoins de la fabrication d’une image, d’un portrait qui n’est plus l’image spéculaire d’un individu.
Esthétiquement proche des radiographies appliquées aux peintures du Quattrocento révélant les repentirs du peintre, le visage du spectateur se donne à voir en surimpression. L’un se fait pluralité, l’individu se fond alors dans la multitude des visages appris par l’algorithme. Des gravures laser sur marbres représentant des visages anonymes ponctuent l’installation, purs fruits de la collecte des données générées par l’apprentissage de la machine. Ils n’existent littéralement pas, du moins, persistent-ils dans notre impression rétinienne comme de potentiels spectateurs passés et objectivés. Si le visage est l’expressif d’autrui et qui me renvoie à ma responsabilité, selon Lévinas, nous sommes alors en droit de nous interroger sur notre responsabilité de spectateur. »
Thomas Depas
Oeuvre autoproduite
Marbres :
From here to eternity / 17.41.09 2019
Matériaux et techniques : Emperador Black Marble, visages générés par intelligence artificielle, découpe laser
From here to eternity / 10.15.58
Matériaux et techniques : Emperador Black Marble, visages générés par intelligence artificielle, découpe laser
Sculpture :
Canny T1
Matériaux et techniques : Acier, verre, Corde en acrylique, Écran, Webcam, Ordinateur, Réseau de neurones artificiels.